J'étais au pub. Tu sais ce pub aux petits carreaux, à lumière tamisée, où il y a toujours du monde.
Du bois, du bois de partout, des vieilles banquettes d'un vert délavé, de petites tables rondes. Une immense bibliothèque... Le piano recouvert de poussière.
La musique... Oh oui la musique.
Et moi, j'étais là, un livre de Henri-David Thoreau à la main, le verre de cidre sur la table, à moitié plein.
Et je regardais ce vieil homme de l'autre coté de la salle. Bien vêtu, élégant, les cheveux cirés, coiffés à l'arrière. Les lunettes posées sur la table. Trois tasses de café vides devant lui. Il semblait faire partie intégrante du décor. Je ne savais pas depuis combien de temps il était là, mais s'il avait eu des racines, cela ne m'aurait pas étonnée.
Il fixait droit devant lui d'un regard tendre . Ces petits yeux bleus pétillaient. Oui cet homme seul était heureux. Et j'étais fascinée.
Il avait quelque chose d'étrange... Son immense quiétude était d'une beauté incroyable.
Il paraissait inaccessible, inexistant... Sortant tout droit de mon imagination.
J'eus très envie de lui dire quelque chose, juste un mot...
"Bonsoir" peut-être.
Mais je ne le fis pas.
Il m'offrit ce petit sourire lorsque j'ouvris la porte afin de m'en aller.
Et je sortis heureuse, sous la pluie.